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Texte de l’homélie
Récemment lors de funérailles célébrées dans notre église paroissiale, la défunte avait demandé, avant sa mort, qu’on écoute à ses funérailles la chanson de Florent Pagny « Apprendre à aimer » En écoutant les dernières paroles de cette chanson : apprendre à aimer et s’en aller, et s’en aller, et s’en aller, je me suis dit n’est-ce pas ce que Jésus a fait : nous apprendre à aimer et s’en aller.
Apprenez-de moi nous, dit Jésus dans l’évangile, que je suis doux et humble de cœur. En nous disant dimanche dernier comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimé et en nous invitant à nous aimer les uns les autres comme il nous a aimés, Jésus nous dit que le but de sa venue sur terre c’est de nous apprendre à aimer comme Dieu nous aime c’est-à-dire d’un amour gratuit, d’un amour qui ne se monnaye pas et qui n’est pas la contrepartie de nos efforts.
Pendant les 40 jours qui ont suivi sa résurrection d’entre les morts, Jésus nous a également appris à le reconnaître dans sa condition nouvelle de ressuscité à travers des signes qu’il nous donne de sa présence. Parmi ces signes qui nous permettent de reconnaître Jésus ressuscité et qui nous sont toujours donnés aujourd’hui, il y a : la fraction du pain, l’appel de son nom, le rassemblement des disciples le premier jour de la semaine, la fécondité de l’apostolat pour ne citer que ces signes-là.
Toujours dans cette chanson de Florent Pagny nous entendons juste après apprendre à aimer et s’en aller, et s’en aller et s’en aller…
Est-ce compatible d’apprendre à aimer et de s’en aller…N’est-ce pas contradictoire ?
S’il est des départs qui sont des abandons comme celui du mercenaire qui, lorsqu’il voit le loup, laisse ses brebis à leur triste sort, il y a aussi des départs qui sont signes d’une confiance donnée et qui font grandir dans la foi, l’espérance et l’amour ceux que l’on quitte.
C’est le cas de l’Ascension de Jésus. L’ascension de Jésus est certes un départ, le départ de Jésus pour la maison de Père mais le but de ce départ de Jésus n’est pas de nous abandonner ni de nous livrer à notre propre sort mais c’est un départ dont le but est de nous faire confiance et de nous faire grandir dans la foi.
Pensons à une personne nous confie une tâche, si cette personne reste constamment à nos côtés, je pense que nous nous demanderions bien vite si celle-ci nous fait réellement confiance. Par contre, si après nous avoir confié une tâche, la personne s’en va et nous laisse, nous nous sentons investis d’une confiance totale et notre désir est d’honorer cette confiance qui nous est faite.
Avant de retourner auprès du Père, Jésus nous confie la mission qu’il a lui-même reçue du Père. Après nous avoir appris à aimer, il nous confie cette mission d’aimer comme il nous a aimés et puis, il se retire car il a confiance en nous, il nous fait confiance…
Outre la confiance, il y a encore un autre aspect de la relation entre Jésus et nous que révèle l’Ascension c’est la liberté. Cet aspect est fort bien souligné par Éric-Emmanuel Schmitt dans son livre « La nuit de feu » lorsqu’il dit ceci :
Je crois que Jésus a effectivement vaincu la mort, qu’il est apparu pendant un certain temps -assez court- à quelques disciples et qu’ensuite il s’est retiré, comme la mer, pour donner à chacun de nous un espace chargé de liberté. La liberté de croire ou de ne pas croire en Lui. On pose, ajoute-t-il, beaucoup de question à propos de la Résurrection et beaucoup moins à propos de la disparition de Jésus subséquente à la Résurrection. Jésus aurait pu, en effet, une fois ressuscité, demeurer parmi les hommes, pour prouver son existence d’une manière magistrale et définitive. Mais non, il fait le choix de ne pas s’imposer à notre regard ; il nous laisse face à l’invisible. En agissant ainsi, Jésus nous montre son infini respect. Le christianisme est une religion basée sur la confiance, sur la foi en un Dieu qui lors de son départ, insiste sur le mode mystérieux de la continuité de sa présence en chacun de nous.
Oui l’Ascension de Jésus n’est pas un abandon de sa part mais depuis son ascension, Jésus nous est encore plus proche tout en nous laissant un espace de liberté. Sa présence auprès du Père, lui permet désormais une plus grande proximité car celle-ci n’est plus limitée à la contingence d’un lieu bien précis. Mais tout en étant une présence sans limites, la présence de Jésus est discrète, à la mesure de son amour qui ne s’impose pas, ne s’impose jamais. Jésus est là, discret, il attend.
Pour cette raison, il ne s’agit pas d’une présence ordinaire. C’est une présence qui demande des yeux qui regardent avec foi, ou mieux encore, qui demande un cœur ouvert, accueillant pour être perçue. Cela exige que nous osions abandonner des formes habituelles de présence pour en découvrir d’autres.
Les récits des apparitions de Jésus Ressuscité l’expriment de diverses manières : Jésus est tantôt un étranger sur notre chemin, un jardinier, un homme sur le rivage au matin, une présence paisible, presque quotidienne, d’aucune manière spectaculaire. Mais, tout à coup, à la fraction du pain, à l’appel de notre nom, il est là, il est vivant !
Le Seigneur se présente à celui qui le désire. Il veut que nous le choisissions ; il veut devenir une nécessité pour nous. Il est présent quand il y a place pour sa présence.
Il est alors le Compagnon dans notre vie et dans notre vie commune.
Le laissons-nous être notre compagnon, celui qui fait route avec nous ?
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